J’aimais un homme à tête de squelette, à tête démesurée

d’après «le Bain» de Jean Luc Lagarce

une proposition theatrale de
Thierry De Chaunac / Nathalie Hauwelle

Dans l’espace réinventé d’une chambre,
un homme raconte,
tente de raconter cette dernière histoire d’amour, les derniers moments :

            «Ce fut difficile,
         difficile et impressionant, et encore, aujourd’hui, le souvenir que j’en garde,
         comme un grand bonheur, un des derniers moments, temps de bohneur qui
         m’ait été donné.»*

Une histoire d’amour -explosante fixe-
entre deux êtres, entre deux univers, plus qu’entre deux hommesLa réalité de la maladie au jour le jour,
la présence de la mort déjà palpable :

   « C’était comme le bohneur le plus grand,
   aujourd’hui le souvenir que je garde,c’était comme le bohneur le plus grand
   d’être si paisibles et le désespoir encore de savoir qu’on se quitte.»*

Un petit théatre de l’univers

Sur le plateau,
un castelet reproduisant la chambre de l’homme,
lieu d’où partent toutes les micro installations, photographies et autres évenements,
crées et filmées en temps réel.
Ce monde de petite taille, projeté à dimension humaine, devient chambre, lieu pour dire l’histoire, lieu de référence où la mémoire est conviée.

De la chambre à l’espace mental,
du réel au rêve,
du présent au souvenir,
il n’y a alors plus qu’un pas....

Souvenir et temps présent

Et Lagarce inventa alors cette ecriture de la transe, répétitive, spirale.
Ecrire, reecrire, comme pour eprouver ce qui a deja été dit, deja vécu,
comme pour s’assurer par l’ecriture que l’on a bien vécu ce moment, ressenti ces émotions.
Dire, redire, répéter, dire encore, rend vivant le moment, le remet à flot, le fait résurgir de la mémoire, l’inscrit
dans le réel.
Raconter, c’est se souvenir, rameuter le passé dans l’instant présent, confronter désir de dire etimages mentales.
Intervient alors la photographie comme preuve;
preuve du temps passé, du comment c’était avant et, à la scène, de son obligatoire réinterprétation dans le présent : mon souvenir est il plus beau que mon histoire?

Intervient aussi la photographie comme possibilité;
L’utilisation du polaroîd apporte le temps présent dans un passé proche.
Déjà, le présent devient souvenir,
tout se mêle, tout se brouille,
le présent déjà passé et le passé si présent.

L’acte performatif

Travailler dans le temps réel, tout afficher -du procedé, processus au résultat, tout faire «là et maintenant» dans le temps continu nécessaire au déroulement de l’action avec ce sentiment unique de la performance, qui est que tout

doit arriver au moment unique de la réunion des acteurs et des spectateurs et que c’est dans cette union que peut se réaliser le dire, le faire.

En créant en temps réel des micro installations, en utilant le polaroid, la scène a autant à voir avec le laboratoire de l’alchimiste qu’avec le plateau de théatre.

Vers la peinture

Un peintre procède par touche, par strate, par accumulation avant d’obtenir le tableau final.
Sous l’oeuvre, il y en a mille autres, que l’on ne verra jamais.
Pour le public, là où la photographie est temoin du temps passé,
l’acte de regarder la peinture est de nature contemplative.

Ainsi, le désir ici était de tirer l’ espace vers la peinture-avec des objets, un corps, du son, en utilisant l’élément temps de la performance, afin de d’inviter le spectateur à regarder la scène comme on regarderait une toile.

En créant des installations en temps réel, dans lesquelles l’acteur s’inscrit comme la part manquante, on retrouve peu à peu le chemin de la peinture.
Le support vidéo, cet applas, est le complice de cette recherche.
Peinture vivante, peinture mouvante, guidéee en cela par la voix et le corps de l’acteur, tous ces élements visent à rejouer le souvenir fait temps présent.

*Extraits du «Bain» de Jean-Luc Lagarce, éditions Les Solitaires Intempestifs

J’aimais un homme à tête de squelette, à tête

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